Mais étrangement, nous
nous taisons. Pas ou peu de messages de soutien, de posts
compassionnels, de tweets indignés.
Est-ce parce que nous
sommes censés être au pouvoir ? Pour, en quelque sorte, ne pas
gêner notre gouvernement, notre ministre de l'Intérieur ? Mais
notre parole libre ne pourrait-elle pas plutôt aider ce ministre, ce
gouvernement ? Ne pouvons-nous, ne devons-nous pas exprimer
notre honte de voir ainsi s'opérer sous nos yeux un remake de
l'affaire Oussekine, par un pouvoir socialiste ?
Parce qu'il y a bien,
rassurez-moi, une manière « de gauche » d'exercer le
pouvoir politique, n'est-ce pas ? Et même une capacité toute
« socialiste » à prôner le dialogue et la concertation
quand des projets mal ficelés font monter la colère populaire ?
Comme a su le faire Jean Marc Ayrault pour le déménagement de
l'aéroport Nantes-Atlantique.
Là est la première
question. La seconde c'est : « Est-il normal qu'un pouvoir
démocratique utilise des armes de guerre contre sa propre
population ? ». En d'autres termes, faut-il parfois tirer
sur la foule ?
On peut se cacher
derrière la langue de bois en acier des communicants politiques :
« attendons les conclusions de l'enquête », « il
n'y a pas eu de bavure » (!), « nous sommes un État de
droit »... mais les faits sont là : la violence était du
côté des forces de l'ordre.
Quelqu'un a tiré, en tir
tendu, sur de jeunes militants écolos, avec des grenades.
Pas de policier blessé, un manifestant mort.
La police est-elle encore
républicaine dans ce pays ? Ou bien lui laisse-t-on la bride
sur le cou, la laisse-t-on exercer sa propre justice, afin de
terroriser le bon peuple ? D'éviter qu'il ne se rebelle contre des
projets ineptes ou pharaoniques ou trop dispendieux ? De l'empêcher
de s'interroger sur le creusement de nos dettes, la corruption des
élus par le BTP, les passe-droits, l'incivilité, les privilèges, l'impunité du
pouvoir ?
Parce que si c'est le
cas, la première question tient sa réponse : il n'y a aucune
différence d'exercice du pouvoir entre gauche et droite et un
Cazeneuve vaut un Pandraud. Le pouvoir gouverne par la peur, parce
que le pouvoir a peur. Peur de réformer sa police, peur de perdre le
pouvoir, peur de devoir rendre des comptes...
Alors le pouvoir laisse
tirer sur la foule, utilisant les « forces de l'ordre »
pour montrer qu'il est fort, qu'il a raison contre les opposants,
tous les opposants, contre le peuple, contre l'histoire.
En tuant à l'occasion un
gamin indiscipliné.