mercredi 4 septembre 2019

Le contresens


Une partie de la gauche extrême s'est découverte une soudaine aversion pour la laïcité. La raison en est tellement simple qu'elle a du mal à être admise par les commentateurs politiques : c'est parce que le FN en a fait un étendard afin de combattre les immigrés en provenance du monde musulman. En bref, les Arabes et les Africains.

Ça ne devrait pourtant étonner personne. Cette gauche a cessé de réfléchir depuis l'irruption sur la scène politique française du Front National, en 1984, où la liste de Jean-Marie Le Pen a fait une percée inattendue à près de 11% des suffrages. Elle en est restée sidérée. Cette gauche maladroite se contente depuis trente ans de gesticuler et d'aboyer "contre le FN", de surtout "ne pas faire le jeu du FN" : il est raciste et d'extrême-droite ? Il suffit d'être "antifa" et "anti-raciste" et de contredire absolument tout ce que peut proposer le FN. Il prône la proportionnelle ? Finalement, le suffrage majoritaire a des vertus ! Cette gauche a fini par remplacer son corpus idéologique original - justice sociale dans le respect des valeurs de la République - par un fatras de mesures sans cohérence interne, pourvu qu'il soit en contradiction frontale avec celui de l'extrême droite.

La première décision dans ce sens est à mettre au crédit du PS, ou plutôt de son think-tank "Terra Nova", qui a un triste jour décidé qu'il fallait abandonner l'électorat populaire au FN et aux lambeaux du PC, pour courir au devant de l'électorat social-démocrate, bon chic, bon genre, et surtout plus fortuné. De là, une dérive droitière qui ne s'est jamais démentie depuis lors, François Hollande en étant le point d'orgue, Emmanuel Macron la coda.

Aujourd'hui, cette incapacité de réfléchir est toujours fièrement exhibée : il aura suffit que le parti de Marine le Pen s'empare de la loi de 1905, rempart contre l'entrisme religieux en politique, pour qu'immédiatement la laïcité exhale des fragrances de soufre et que certains y perçoivent des relents de racisme...

L'extrême-gauche, jamais avare de contresens, y a même décelé une atteinte à la liberté des musulmans intégristes d'imposer leurs mœurs, dogmes et croyances religieuses dans la sphère sociale, oubliant sans doute que les religions ne font tout simplement pas partie de la république, et que la seule chose que peuvent réclamer des croyants à l'état français – précisément grâce à la loi de séparation ! – c'est le libre exercice de leur culte.

Utilisant l'argument du racisme pour contraindre la politique française à revenir sur la loi de laïcité, il n'a pas fallu longtemps à cette gauche rance, rancunière et revancharde, pour remplacer la lutte des classes par la soumission au communautarisme islamiste. Engrangeant sans discernement la novlangue farcie d'islamophobie, de décolonialisme et de luttes intersectionnelles, l'extrême-gauche pense ainsi s'être refait une virginité prolétarienne à peu de frais - ne seraient les contradictions flagrantes avec le logiciel marxiste !

Étrangement, seule Lutte Ouvrière a su éviter le naufrage, en identifiant correctement les éléments politiques présents sur l'étalage : le communautarisme fait le jeu des racistes et mine la république ; les religions sont le prozac du prolétariat ; l'islamisme est financé par les pétromonarchies ; l'idéologie de la charia est contraire aux droits humains (violente, sexiste, homophobe, obscurantiste, dictatoriale...) ; l'islamisme tue, sans discernement, et ne propose aucune révolution sociale contre l'ordre capitaliste !

Mais pour être de gauche aujourd'hui, il faut et il suffit, simplement, de renier les valeurs de la gauche d'hier ! Il ne suffit plus de ne pas être raciste, il faut être anti-raciste et pro-racisés ; et si possible avoir honte d'être français et blanc ! Il ne faut plus être laïque, mais multiculturaliste, en oubliant au passage que "la laïcité a produit plus de libertés que ne l’a fait aucune religion investie du pouvoir politique ou ayant l’oreille complaisante de ce dernier." (Catherine Kintzler).

Parce que pour cette gauche aujourd'hui, être progressiste c'est seulement se positionner à l'exact opposé de ce qu'est le Front national ! 

Je ne doute pas une seule seconde que si le FN appelait un jour à l'égalité des salaires H-F ou à un plafonnement des hauts-salaires patronaux (ce qu'à dieu ne plaise...), on verrait immédiatement surgir ces hordes gauchistes pour affirmer qu'une disparité salariale est conforme à l'esprit révolutionnaire et que si on travaille plus, eh bien, il est normal de gagner plus !